jeudi 25 mars 2010

Comme un léger goût de trop lourd

Mon poids et moi, ça fait un an et demi qu'on se balade ensemble, tous les jours, main dans la poignée d'amour. Enfin, si je suis honnête, ça fait bien plus longtemps que ça, depuis l'adolescence, sans doute, où mes kilos étaient sous monitoring constant. Après, je les ai parfois enfouis sous le tapis de ma culpabilité, dans un coin de ma tête. Jamais très loin de mes pensées.

Mais depuis un an et demi, c'est du sérieux. J'ai repris le régime M&M's (Meight Matchers (c) vous connaissez, non?). Depuis un an et demi, je calcule les points, ajoute, soustrais, développe des stratégies. M&M's, le seul régime qui permet à votre cerveau de gonfler quand votre ventre dégonfle.

Tous les mardis depuis le 25 novembre 2008, je vais à la réunion M&M's. Tous les mardis, je monte sur Cruella (petit surnom de la balance donné par la coach), je retrouve les copines de fortune ou d'infortune (ça dépend des semaines), je fais le plein de motivation puis je rentre m'enfiler une pizza ou un "spécial". Ben oui, autant le faire le mardi pour avoir une semaine pour éliminer...

Car au fil des mois, je suis devenue, avec la complicité des copines M&M's, une véritable pro de la stratégie alimentaire, pour faire pencher la balance vers un chiffre positif pour moi, c'est-à-dire un moins (vous suivez?). Ainsi, j'évite les féculents dès le lundi (surtout les pâtes), parce que ça s'élimine plus difficilement que les légumes, par exemple. Pas de trucs trop gras, non plus, ni de portions trop importantes. Dès le dimanche soir (idéalement), c'est ceinture.

Mais c'est faux-cul, s'offusque la lectrice raisonnable! Oui, c'est vrai, mais ça permet de limiter les dégâts le mardi et de ne pas se démolir le moral. Parce que oui, M. Léludemoncoeur sait à ma tête, au retour de ma réunion M&M's, s'il va avoir droit à la pizza de fête ou au blanc de poulet des jours difficiles... Les premiers mois, ça a été la fête à la maison toutes les semaines (mais uniquement le mardi, si vous suivez toujours). Mais ça a pas mal changé ces derniers temps.

Parce que la lassitude s'installe, à force. Depuis six mois, environ, j'ai repris, lentement mais surement, trois à quatre kilos qui refusent de me lâcher. Mais t'es bien comme ça!!, s'écrient les copines bien intentionnées. Sauf que non, moi, je me sens mieux avec ces trois-quatre kilos en moins, moins visibles dans les fesses que dans ma tête, sans doute. Après un an et demi, ça m'amuse moins de compter les points, de cuisiner du sain, de respecter les cinq atouts de la forme.

Attention! j'ai jamais été une ayatollah du régime. Je n'ai jamais noté les quarts de points consommés et culpabilisant à mort pour la tranche de cake ou le biscuit grignoté en sentant déjà les flammes de l'enfer lécher mes bourrelets. Je me suis toujours arrangée avec ma conscience et mon carnet à points mental pour arrêter de compter quand le compteur risquait l'emballement ("non, pas la Coupe Explosion de chocol.... grouiiiiiik hiiiiii... allô?"). En général, éviter la culpabilité et trop de prise de tête, ça a plutôt bien marché. Mais faut croire que mon détecteur à kilos en plus est un peu déréglé ces derniers temps.

Le côté consolant, c'est que je ne suis pas la seule à me lasser. Les autres "vétéranes" de la réunion, celles qui ne peuvent plus se vanter d'avoir perdu 4 kilos en un mois parce que ça fait plus d'un an qu'elles sont là, se cherchent aussi un nouveau souffle. Et les encouragements de la coach, "parce que vous le valez bien", "il faut remettre l'église au milieu du villâââge", "les kilos sont pas venus du jour au lendemain, ils vont pas partir en une nuit!", n'y font plus grand chose. Mardi, on en était tellement au "pffff, t'façons j'vais r'prendre tous mes kilos et je finirai par mourir étouffée par un durum" qu'à trois, on aurait presque risqué de provoquer la faillite de M&M's (c) pour cause d'épidémie de découragement.

Alors, comme les M&Mousquetaires, on a décidé de s'unir, et de relever la tête. Ahaaaaaaah, maudits kilos!! Mais sacrebleu! Que trépasse si je faiblis! (Comme l'époque moderne nous permet d'éviter de nous hisser sur nos fidèles destriers afin d'unir nos épées dans un même geste, on a juste échangé nos adresses e-mails et on réinvente la solidarité/coaching. Hop! un ptit mail pour voir si les autres aussi ont bien fait attention à ce qu'elle mangent et c'est reparti, on se sent un peu soutenues.)

Ca fait alcooliques anonymes, c'est vrai, mais la situation est grave. Pâques approche et le cortège de petits oeufs en chocolat fait déjà la danse du ventre dans les magasins. Et ce serait dommage d'avoir les résidus d'oeufs de Pâques qui débordent du maillot de bain sur les plages en juillet.

Allez, j'vous laisse, j'ai un carnet de points à remplir. Quelqu'un sait combien ça fait, 5 oeufs praliné noir Galler?


PS: j'ai vraiment une balance comme celle ci-dessus. Mais en rose

samedi 20 mars 2010

(Almost) ordinary people


Deux blondinettes aux yeux bleus, vêtues du même manteau rouge. Deux fillettes qui accompagnent leurs parents et leur petit frère, le petit roi sans doute. Toute une famille d'yeux bleus. On s'en fout, qu'ils aient les yeux bleus, non? Pas moi. Ils m'ont fascinée il y a deux mois, quand je suis entrée dans le camp de réfugiés palestiniens de Shuafat, au nord-est de Jérusalem. Ces deux petites filles, leurs parents et leur frère font partie des 35.000 habitants de ce camp surpeuplé.

Ce qui m'avait frappée en arrivant là-bas, outre les check-points où il faut montrer patte blanche (ça aide, d'accompagner un ministre), c'est l'odeur. Il y flotte un délicat fumet de poubelles éventrées, d'ordures à l'air libre. Ca pue franchement, donc. Et ce n'est pas étonnant: où qu'on pose le regard, on trouve des déchets, des débris de construction, de vieilles godasses qui font partie du chemin tellement elles ont été foulées et écrasées par les roues des voitures.

Cette première impression olfactive actée, l'étouffement se fait quasi physique. Le camp est devenu beaucoup trop exigu pour contenir toute la population et la circulation qui va avec. Bus, voitures, camions, tout le monde klaxonne à qui mieux mieux et c'est celui qui se fait le plus entendre qui emporte la victoire symbolique. Parce que ça ne fait évidemment pas avancer le schmilblick.

Ces deux petites filles, assises sagement sur un débris de construction, attendaient le bus, si je me souviens bien. A peu près indifférentes aux bouchons et à l'agitation de la rue.

Aujourd'hui, je repensais à elles, à ce débris-siège de fortune. Après avoir lu cette semaine dans le journal que les affrontements entre (jeunes) Palestiniens et forces de l'ordre israéliennes sont particulièrement intenses à Shuafat, je me demande si ce "siège" a servi à canarder le soldat israélien, s'il a atterri sur un bouclier ou a blessé quelqu'un.

Il y a deux mois, j'avais aimé ce petit moment de grâce, ces fillettes sous le soleil, cette pause dans l'étouffement. Leurs yeux bleus et leurs cheveux blonds.


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Pour alimenter la réflexion, je vous conseille les excellents ouvrages de Charles Enderlin, correspondant de France 2 au Proche-Orient. Personnellement, je viens de terminer "Le grand aveuglement, Israël et l'irrésistible ascension de l'Islam radical", après avoir lu "Le rêve brisé: histoire de l'échec du processus de paix au Proche-Orient 1995-2002". J'ai picoré un peu, car "Le rêve brisé" s'inscrit dans une série d'ouvrages (un avant et un après) sur l'histoire des négociations de paix entre Israël et les Palestiniens, tandis que "Le grand aveuglement" (le livre le plus récent puisque paru en 2009) est transversal et explique l'apparition et l'ascension du Hamas (mais aussi du Hezbollah et de tous ces mouvements radicaux).

On en ressort avec un sacré goût de gâchis en bouche, l'impression qu'on est parfois passé à deux cheveux d'une solution raisonnable pour tous et que, en fin de compte, même les hommes qu'on pense grands sont faillibles et exposés aux erreurs politiques, de jugement, etc.

Ces deux plongées dans le problème du Proche-Orient m'ont donné envie de continuer à m'y intéresser de près et à lire les autres publications de Charles Enderlin et m'ont permis de décrypter les événements suivis de loin en remettant en question ce que je croyais. Le correspondant de France 2 fournit selon moi un travail extrêmement bien documenté, minutieux et sans concession.

Par contre, je décline toute responsabilité si, après lecture, vous vous exclamez en boucle: "c'est fou de voir comme l'histoire se répète!"

mardi 16 mars 2010

La fête des femmes - les femmes à la fête?

Je ne sais pas pourquoi ça m'a remuée particulièrement cette année. Pourquoi, plus que les autres fois, j'ai été attentive aux différents reportages, réceptive aux indignations.


Parce que bon, au départ, des Journées de la femme, yen a tous les ans. Depuis avant ma naissance, même. Les autres années, je souris, crispée, aux blagues de merde sur la vaisselle, la place de la femme (dans la cuisine, évidemment) et je voûte les épaules en attendant que ça passe.

Est-ce les vents de contestation soufflant en rafales sur Twitter et Facebook? Est-ce tous ces reportages sur l'égalité hommes-femmes (en gros, si vous débarquez de Mars, c'est pas encore gagné gagné, si vous voyez ce que je veux dire)? Toujours est-il que depuis lundi dernier, ça tourne et retourne dans ma caboche (et dans ces cas-là, vaut mieux pas être dans les parages).

Je vous épargnerai les considérations métaphysico-angoissées. Ce n'est pas -encore- le lieu pour en parler. Je ne poste pas quatre billets par an pour plomber l'ambiance, naméo!


Non, ce soir, je vais vous entretenir (profitez-en, c'est pas souvent qu'une femme entretient) d'un sujet bizarre et un peu préoccupant. J'en viens zaux faits.

Grâce à la magie de Facebook, et d'un amoureux légèrement Sicilien à ses heures perdues, j'en apprends tous les jours un peu plus sur l'Italian way of life, en direk' laïve from là-bas.

J'aime autant vous dire que là-bas, on ne rigole pas avec la Festa delle donne. Aaaaah non! ça Madame!! C'est quasi aussi sacré que la Santa Salsice (la Sainte-Saucisse, sans doute la Journée de l'homme à la sauce -si je puis dire- sicilienne). Et vas-y que je te souhaite une bonne fête, et vas-y que je te tagge dans des photos plus kitschissimes les unes que les autres. Et ça fait des sorties entre filles, tout ça.

La méga-teuf!


A côté de ça, j'ai envie de dire: heureusement qu'elles se bourrent la gueule. Parce qu'il faut oublier les grosses pouffes de la télé. Le modèle de la femme italienne. Bouche collagénée, toutes la même colo, les mêmes lentilles bleues, les neurones qui ont démissionné depuis longtemps. C'est dur.

Vous voyez pas le genre? Vous regardez pas la télé italienne ou quoi? :-/ Mais vous passez votre temps à quoi, les gens? Parle plus fort! A faire des trucs intéressants? Mais la télé italienne aussi, c'est intéressant!

On y voit des filles débarquer dans les émissions, on sait pas trop ce qu'elles font là. Elles font semblant de marcher comme des mannequins pendant quatre pas, se tordent en deux genre "regardez, je fais toujours le mannequin!" et puis sourient. Ya un grand blanc (enfin non, en général, la musique continue), mais on voit bien que la fille se mettra pas à parler tout de suite. Non, parce qu'elle sourit, et que son neurone est déjà fort occupé à lui dire "mais souris!! souris bordel! Et regarde la caméra en même temps! En même temps! N'oublie pas de sourire, non plus!" (Là, on sent le neurone au bord de la démission).

La fille sourit, donc. Et ça dure une plombe. Si yavait pas un écran de télé entre elle et nous, on serait gêné, parce qu'on pressent que même une remarque sur la douceur du climat risque de la mettre en difficulté.

Parfois, elle danse, avec d'autres filles aussi souriantes qu'elle. Enfin, elle danse... elle jette les bras d'un côté à l'autre du corps en se dandinant.

Cette fille, finalement, c'est ZE incarnation de la réussite sociale, en Italie. Si on part, bien sûr, du raisonnement tenu par la téléspectatrice lambda que si on passe devant la caméra, c'est qu'on a réussi.

Mais comme vous l'avez deviné, ne s'improvise pas starlette du petit écran qui veut. Non! Il faut les qualités susmentionnées. Et si en plus, votre cerveau est resté en cuisine pour préparer la bolo du soir, l'Italien moyen est heu-reux! La preuve avec ce gag qui a fait le tour de la toile et qui fait encore plus aimer Muse.

Même pour être présentatrice du TG (oui, parce qu'en Italie on dit TeleGiornale), faut se faire arranger un peu. Ca donne des bonnes femmes dont on croirait presque qu'elles sont mues par un ventriloque tellement leur visage bouge pas.

Un genre de marionnettes dans un décor de JT. Mais j'y pense: ce serait bien, ça, comme concept, non?



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Pour alimenter la réflexion:

- Un article de Slate.fr sur les femmes dans le pays de Berlusconi (et c'est pas facile). Cliquez cliquez sur le lien renvoyant au docu très édifiant "le Corps des femmes". N'ayez pas peur, c'est en italien mais c'est sous-titré en anglais. No excuses, my friend!

- Le billet de Marie la twitteuse (mais pas que) sur la Journée de la femme (qui est souvent celle de l'homme en négatif)
Lien
- Et celui de Ganaëlle, toujours sur le même sujet.