vendredi 5 novembre 2010

La gueule de bois du lecteur

L'urgence de tenir, doublée de la crainte de finir trop vite. Savourer le feu d'artifice final et puis... expérimenter le manque, cette petite solitude, cette question: "et maintenant, que vais-je faire?"








Oui, terminer un livre, c'est un petit deuil à chaque fois. Une séparation à contre-coeur, surtout quand l'intrigue était prenante, quand l'auteur a réussi à nous prendre par les yeux, par la main, pour nous emmener avec lui au coeur de l'histoire, à côté de ses personnages. Pour moi, le meilleur remède dans ces cas-là, c'est de combattre le mal par le mal: enchaîner directement avec autre chose, un autre livre. Vous pensez qu'on a encore de quoi faire avec les onze kilos (oui, 11 kilos!) de bouquins ramenés de Paris fin juillet? Ahah, mes innocents lecteurs chéris!

Mais ils sont quasiment tous lus, et depuis longtemps! Ou alors ils sont stockés dans des caisses sur lesquelles je n'ai pas eu la patience de noter consciencieusement tous les titres de bouquins y-stockés.

Heureusement, M. Léludemoncoeur est un biblivore. Il fait cramer ma carte de crédit sur Amazon.fr pour dénicher ZE perle de littérature journalistique qu'il FAUT avoir pour en être (en être de quoi, je ne sais pas, mais en tout cas, on les a). Oh! Je ne me plains pas! Il m'a ainsi permis de découvrir (mieux vaut tard que jamais) l'excellent Alain Rémond, chroniqueur téléphage de son Oeil dans Télérama et, depuis, billetiste pour Marianne et La Croix.

Ce type est une source d'inspiration et d'admiration pour moi. Il prouve qu'on peut parler de micro-choses du quotidien, de sa propre vie, de manière intelligente, drôle et vive. Je vous conseille tout particulièrement "Le cintre était sur la banquette arrière", recueil de ses chroniques hebdomadaires dans Marianne. Ca parle de cintre (sans blague?), de banquette arrière (sans blague??), d'amitiés, de chapeau, d'oiseau, de Bretagne. C'est furieusement drôle, fin, bien pensé et écrit. Si un jour je pouvais m'approcher de son brio, je pourrais euh... je sais pas ce que je pourrais faire, mais je serais très heureuse :-)

Pour éviter la dépression post-lecture, je me suis plongée dans un polar suédois. Depuis la trilogie Millenium, l'envie me démangeait de découvrir d'autres auteurs suédois. Par contre, même si j'aime bien la collection Actes Noirs, je n'avais pas envie de dépenser à chaque fois moult et moult sous. L'autre jour, en ne cherchant pas vraiment, je suis tombée sans me faire mal sur "Je voudrais que cela ne finisse jamais", de Ake Edwardson, un... polar suédois dont le personnage principal est Erik Winter, un commissaire fumeur de cigarillos Corps Diplomatique.

Par prudence, je n'ai acheté que ce tome-là des aventures d'Erik Winter, me disant que j'aurais bien l'occasion, si ça me plaisait, de racheter les livres suivants une autre fois. Ah! Que j'ai regretté mon accès de raisonnabilité, une fois les 392 pages englouties!! Je me suis retrouvée un samedi midi, orpheline des personnages que je venais de quitter, me demandant jusqu'à l'obsession ce qui leur arrivait ensuite.

La Suède décrite par Ake (faut un rond sur le A, normalement, pour que ça se prononce Oke) est estivale, voire caniculaire, avec des nuits réduites à rien, des températures qui frisent la suffocation et qui donnent à l'ambiance globale du livre sa moiteur. On est pris dans un étau, une sorte de fatigue physique similaire à celle des personnages. C'est bien écrit, bien qu'un peu lent au début. Mais ça participe sans doute au climat de l'intrigue, ralentie par la chaleur.

Au bout de quelques heures d'orphelinat, mes yeux sont tombés sur "1984". "Tu ne l'as jamais lu? Oh! Tu devrais!", m'a lancé M. Léludemoncoeur. Sitôt conseillé sitôt fait: je me suis plongée dans l'univers gris de l'Oceania, de son parti Extérieur et de Big Brother. Evidemment, ça fait soixante ans que j'aurais dû lire ce livre. Ou dix ans, à tout le moins, quand "Big Brother", la télé-réalité, a fait son apparition en Flandre. Fainéantise? Manque d'intérêt? Jusqu'ici, je n'avais jamais fait le pas et c'était bien dommage.

J'ai terminé le bouquin ce matin. C'est désespérant. Flippant. D'autant plus, en fait, que certains passages ont bizarrement trouvé un écho au boulot cette semaine. La réécriture perpétuelle du passé, son effacement pour laisser la place à de nouveaux souvenirs, la mémoire des habitants d'Oceania qui se trouble et change au fur et à mesure de ce que leur dise les chefs, tout ça m'est revenu lors d'une conversation banale avec un collègue. Rien de grave, ni de manipulatoire, mais ça m'a interpellée quand même... Tout ça pour dire que si vous ne l'avez pas encore lu, je vous le recommande vivement.

Pour éviter la gueule de bois de la lectrice en cours de sevrage, je viens de me jeter sur "Le Quai de Ouistreham", de Florence Aubenas (oui, je sais, quasi un an après tout le monde). Et j'enchaînerai sans doute avec son livre sur l'affaire d'Outreau. J'ai lu des critiques dithyrambiques sur "le Quai", et d'autres qui traitaient Aubenas de spectatrice parisienne chipotant dans le bourbier provincial en se pinçant le nez. J'ai hâte de me faire mon opinion... et éventuellement de vous la faire partager.

Ceci était l'épisode huit (si j'ai bien suivi) de la série de l'été. Quoi? On n'est plus en été? Bah non, mais tant qu'on a du soleil dans le coeur, hein...

5 commentaires:

  1. Je note pour Ake et pour 1984, merci! :-)
    Florence Aubenas, j'ai lu et il m'a beaucoup marquée.
    Et comme ça ne fait jamais de mal de partager, voici mes deux derniers coups de coeur: le dernier de Elizabeth George (une intrigue du feu de Dieu) et "La chute des Géants", de Ken Follet (ou comment rendre l'Histoire captivante grâce à une histoire passionnante).

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  2. Elizabeth George, évidemment que je vais me ruer dessus à la première occasion :-) Et j'aime bien Ken Follett aussi, donc...

    j'ai terminé Le Quai de Ouistreham et je crois que je le chroniquerai quand j'aurai fini celui sur Outreau (La Méprise).

    Je te conseille aussi Alain Rémond, si tu tombes un jour par hasard dessus dans une bibliothèque par exemple. Ses billets sont... wouaaah!

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  3. Moi aussi j'enchaine tout de suite pour ne pas pleurer la fin d'un livre...

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  4. A découvrir aussi Arnaldur indradisson auteur islandais, dépaysement assuré un autre auteur nordique à découvrir.

    mamzelvero

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